Édito – Quelles places pour la CGT pendant les présidentielles et… les législatives ?

Si vous avez écouté la radio, la TV, lu le journal, ce matin ou… ces 2 derniers mois, vous n’êtes pas passé à côté : Tadam ! Les présidentielles arrivent.

Alors Macron se dépêche… Il entonne le clairon des réformes à venir : un peu de retraite par ci, un peu d’assurance chômage par là et une pincée de santé au travail sur le dessus. Il joue au Gérard Majax des augmentations salariales : et hop, j’te baisse les cotisations et zip je nique la sécu et abracadabra : regarde, ton pouvoir d’achat, comme il augmente ! Vous savez, le « pouvoir d’achat », ce super pouvoir qui semble être l’alpha et l’oméga du français moyen. Celui qui te permet de consommer toujours plus, de t’endetter plus, de faire encore plus tourner la machine capitaliste sans te demander pourquoi les hôpitaux crèvent, les soins sont déremboursés, les gosses sont en panne de prof ou les retraites sont sabrées !

Donc voilà, en résumé, la fin du quinquennat Macron, c’est un peu comme les amuses bouches bio aux noms compliqués que tu rajoutes à ton menu de Noël pour impressionner ta belle mère. Fraîcheur Saumonée sur canapé aux accents orientaux et sa brume d’Aneth… L’idée c’est de montrer que ceux qui ont cru en toi on en pour leur agent. Bon, c’est aussi de sous-entendre que si on ne se réabonne pas pour 5 ans, on aura pas « la chance » de voir la saison 2. Ni de savoir si Kimberly, qui est tombé dans les escaliers à la fin du dernier épisode est vraiment morte dans d’atroces souffrances ou si elle s’est juste foulé la cheville.

Et pendant ce temps là, de vidéo Youtube en grands débats des primaires, la droite s’extrémise et les candidats à porter des idées et des valeurs douteuses se multiplient…

Face à ça, il y a deux façons de voir les chose. A mon sens les deux s’entendent.

La première est de ressentir un grand sentiment de lassitude, de désespoir, à la pensée que les idées à dégueuler qui font le terreau de l’extrême droite aient le vent en poupe. D’avoir une légère nausée en voyant des candidats revendiqués d’une droite « bien propre », dans leurs beaux costumes LR, osent maintenant sans complexe taper sur migrants et arabes. Et de tomber dans le désespoir le plus complet face à l’avenir politique de ce pays qui, décidément, s’enfonce dans la fange.

La seconde est de regarder ça d’un œil plus stratégique. Ces gros abrutis, qui n’avaient pour seul argument, face à la gauche que de dénoncer son éparpillement sont en train de faire pareil. Ces candidats, qui depuis Jaures, profitaient sans vergogne du vaste panel désunis de force de gauche pour présenter bloc de droite et rafler la mise sont en train de sauter dans ce travers à pied joint. Parce qu’à part une carré blond ou un regard rapace, quelle différence entre un Zemmour, une Lepen et une Hidalgo ? La droite, devenue extrême, se disperse, elle s’éparpille…

Bizarrement aucune Léa Salamé, aucun Jean-Jacques Bourdin, ne leur demande, à eux : « mais pourquoi pas une candidature commune, comment ça se fait que vous n’arriviez pas à vous mettre d’accord ? » Pourtant, on est en droit de se le demander !

Danser sur les braises des uns ne fera pas pour autant renaître les autres de leurs cendres. Ce n’est pas parce que la droite va nous gratifier d’un vaste panel de candidats « tous pareil tous les mêmes » que notre gauche tire son épingle du jeu.

La aussi deux façon de voir : on peut en être désespéré ou se dire qu’après tout, c’est normal, ils ont tous des nuances irréconciliables… Mais ça ne nous aide pas à répondre à cette question : comment faire progresser ces idées, celles de la gauche, autour de nous, dans nos entreprises ?

Certains vont peut être se dire que le rôle de la CGT n’est pas de faire campagne pour untel ou un autre. Et en effet, je partage l’idée. Mais l’une de nos missions reste de faire progresser les valeurs de la gauche. Et penser que militer au syndicat n’est pas un acte politique est, à mon sens, une grosse connerie.

Aujourd’hui, nous ne nous battons plus contre un patron, qui exploite quelques salariés. Contre un autre qui ne paye pas les heures sup… Les combats des dernières années, tous secteurs confondus, ont été mené contre des lois, contre des réformes. Loi Travail, réforme des retraites, réforme de la fonction publique, réforme de la SNCF… Et j’en passe.

Nous savons tous que si nos entreprises et fonctions publics ont le moyen législatif de nous mettre à genoux, elles le feront. C’est même devenu quelque chose de normal, on ne se pose pas la question. Alors c’est contre l’arsenal législatif qui leur donne les moyens de le faire que nous nous battons. Et ça, c’est de la politique !

Alors que pouvons nous porter, en cette période d’élection présidentielles ET surtout… législatives, pour convaincre nos collègues que mettre un coup de frein à ce système qui nous oppresse, qui nous détruit, ce n’est pas se tourner vers l’extrême droite ? Sauter à pieds joints dans le petit monde fabuleux de Marine ou d’Eric ou tous les étrangers sont de gros méchants qui ne font que nous tondre la laine sur le dos ? Pour faire comprendre à ceux que nous cotoyons que c’est notre modèle social, notre système de répartition des richesses le problème. Pour faire court, que c’est le capitalisme qui nous met dans la merde.

Certains d’entre vous ont participé à la formation « Lutter contre les idées d’extrêmes droite » donné par l’association VISA début décembre à l’UD. En tout 27 militants CGT, FSU et SUD ont planché autour de thèmes comme le complotisme, la désinformation, le décryptage des programmes, etc. Bien que la formation ai eu un vrai succès de par les méthodes utilisées, deux jours paraissent courts pour imaginer concrètement comment se saisir de ces enjeux dans nos entreprises.

Alors on fait quoi ? Vu que Pierre Rabi nous a quitté ce mois-ci, je vais faire référence à l’histoire du colibri. Pour ceux qui ne la connaissent pas : c’est l’histoire d’une grande forêt en feu. Devant ce massacre, tous les animaux, terrifiés, atterrés observent le désastre des larmes dans les yeux. Seul un petit colibri s’active, en allant chercher quelques petites goûtes dans son bec et en les répandant sur les flammes. Les autres animaux le traitent alors de barge, lui expliquant que ce n’est pas avec ses malheureuses gouttes qu’il enteindra le feu. Le colibri, loin d’être couillon continue de s’activer et leur répondit simplement: « je sais mais je fais ma part ».

A la CGT, on a souvent le tort d’imaginer que si on y croit vraiment, si on milite assez fort, assez souvent, assez assidûment on allumera ce grand incendie de la révolte dans les consciences. Et d’autres fois, en pleine phase de blues du militant, on se dit que, quand même « on se lève bien le cul pour rien ». Cette histoire du colibri nous questionne sur pourquoi on fait les choses. Est-ce que je vais en manif parce que je me dis qu’en me voyant, si sur de moi, tous les gens dans la rue vont m’emboîter le pas d’un air décidé ? Est ce que je prend la peine de corriger mon collègue, qui s’enthousiasme à la machine à café du super programme patriote de Marine, en pensant que d’un coup toute ma boite va comprendre les mécanismes du FN et voter à gauche ?

Bien sur que non, dis comme ça c’est évident. Si je milite aujourd’hui, si je me caille le jonc en manifestation ou si je m’accroche avec ce collègue qui n’a pas compris la différence entre patriotisme et racisme, ce n’est pas pour changer le monde en une seconde. C’est déjà parce que si je ne le faisais pas je ne pourrait pas me regarder en face. C’est pour défendre des valeurs auxquelles je crois profondément. C’est pour faire « ma part ».

Et c’est, à mon sens, ce que nous devrons garder à l’esprit au long de ces élections. Notre job n’est pas de renverser la donne mais chacun peut et doit faire sa part. Porter ses valeurs et les soigner quand elles sont égratignés ou fatigués. Faire preuve de pédagogie, expliquer, démontrer par exemple, que les législatives sont aussi importantes que les présidentielles, que c’est un match retour. Que les cotisations ne sont pas juste un moyen de nous ponctionner du salaire. Parce que ce ne sera pas notre faute si la gauche, n’importe laquelle, ne se démarque pas, si nous repartons pour 5 ans à essayer de nous maintenir la tête de l’eau, mais nous pourrons tous pleurer si nous n’avons pas essayé !

AP.

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