Les problématiques autour de l’approvisionnement en eau de la ville de Gap font actuellement polémiques. A partir des rapports et informations sur le sujet, la CGT des Hautes-Alpes tente d’expliquer la crise.
Urgence sécheresse : un air de déjà vu
A moins de vivre sur une autre planète, difficile de passer à côté de la sécheresse que nous subissons ce moment. Seule la gestion raisonnée de l’irrigation, de l’eau potable ou du tourisme parviennent à empêcher la catastrophe. En cause, l’absence de précipitations et les vagues de chaleur successives. Des évènements inquiétants qui nous touchent directement et qui ont de quoi convaincre tous les sceptiques du réchauffement climatique, ou presque.
Lors de la sécheresse de 2017, via une permission exceptionnelle, la ville de Gap était autorisée à ponctionner la nappe phréatique profonde de la plaine de Chabottes, « les Choulières », pour abreuver ses habitants. Malgré l’engagement pris de mettre en place les moyens de sécuriser son approvisionnement en eau potable, cette année encore la ville se retrouve en alerte.
Pourtant, en 2018 l’Agglomération Gap Tallard Durance et 6 autres communes adhèrent au Syndicat Intercommunal d’Exploitation de la Nappe Alluviale du Drac (SIENAD) pour réaliser un projet permettant de capter et d’acheminer l’eau potable de la nappe des Choulières. Avant de décider subitement d’abandonner le projet au moment même de la parution de l’appel d’offre.
Une solution mise en échec par la ville de Gap
En cause, l’immobilisme du maire de Gap décidé, contre l’avis des spécialistes de l’eau, à ne pas utiliser cette nappe. En mars 2021, la SIENAD entame une étude complète pour étudier les différents scénarios de sécurisation en eau potable de la ville de Gap. Dans ce laps de temps, aucune solution n’est mise en œuvre à Gap, expliquant la nouvelle pénurie d’eau à laquelle la ville doit faire face aujourd’hui alors que les communes champsaurines parties prenantes du projet termine les travaux permettant de puiser l’eau aux Choulières.
Le scénario envisagé par l’élu vise à conserver la prise d’eau actuelle, pourtant bridée par les contraintes de débit et sensible à la pollution, et à n’utiliser la nappe des Choulières qu’en guise d’appoint pour faire face à des réserves trop basses. Elle serait alors renvoyée dans le Canal de Gap. En parallèle, il envisage de remettre à niveau la station de potabilisation.
Fin juin, le cabinet en charge de l’étude des scénarios rend ses résultats. Le scénario défendu par Roger Didier semble être jugé peu cohérent et démontre une absence criante de vision à long terme. Non subventionnable car désapprouvé par les experts et l’agence de l’eau, il représenterait un surcoût d’environ 7 millions d’euros pour les gapençais.
Un scénario de repli incohérent et court-termiste
Dans la situation actuelle, comme avec le scénario du Maire de Gap, 75% de l’eau du Drac est dirigée vers le bassin gapençais. Ce qui n’est pas sans porter préjudices (économie, tourisme, agriculture, environnement) à la vallée du Champsaur qui doit se contenter du quart restant. Face aux nombreuses sécheresses auxquelles nous faisons et devront faire face dans les années à venir, cette solution laisse déjà apparaitre ces nombreuses failles qui sont neutralisées en cas d’utilisation de la nappe de Chabottes.
En cas de sécherresse justement, le scénario de Roger Didiser prévoit de mélanger l’eau pure de la nappe profonde, qui ne nécessite aucun traitement, à l’eau de surface du Canal de Gap. Ce qui demanderait de facto de potabiliser toute l’eau arrivant sur Gap et la rendrait sensible à la pollution car circulant en surface. Une éventualité où le bon sens semble avoir déserté la partie.
De plus, utiliser pleinement la nappe des Choulières rendrait la réserve des Jaussauds totalement disponible pour l’irrigation, d’autant qu’elle pourrait être rempli par les grandes pluies, ce qui est actuellement impossible pour produire de l’eau potable. A l’heure où consommer des produits de proximité apparait comme l’une des clés pour lutter contre le changement climatique, cette éventualité prend tout son sens.
Un combat d’intérêt général
L’étude réalisée a pu évaluer deux autres scénarios présentant des avantages techniques, juridiques et administratifs. Ces options, concertées et partagées avec les communes du Champsaur via le SIENAD s’inscrivent dans une vision à long terme, plus respectueuse de l’environnement et sont soutenus par les grandes instances de gestion de l’eau.
Aujourd’hui de nombreux acteurs politiques, associatifs et citoyens s’insurgent et affirment haut et fort que les gapençais ont le droit, non seulement de comprendre la problématique, mais aussi de donner leurs avis. Nous sommes face à une situation d’urgence où les égos et le court-termisme devraient s’effacer face à l’intérêt général et au défi environnemental. Espérons que ce sera le cas !